Marina Berts

Textile Artist and Researcher

Dialogue ou communication?

Il y a quelques temps, j’ai présenté ce qu’est le coaching holistique à une trentaine de femmes entrepreneures dans le cadre de l’association Femmes PME Suisse romande, dont je suis membre. Avec une autre membre de l’association, Angela Meylan, nous proposions une conférence sur le thème ‘Globalité, conscience et dialogue: remettre l’humain au centre’. Nous voulions présenter nos activités professionnelles respectives qui se basent sur une approche globale (ou holistique) de l’être humain, sur une prise de conscience et sur le dialogue entre la professionnelle et son.sa client.e.

Lors de l’apéritif qui a suivi la présentation, j’ai eu l’occasion de discuter avec certaines personnes et répondre à leurs questions. Une jeune femme m’a interpellée sur une question qui me trotte encore dans la tête, bien que le temps passe et que d’autres choses occupent mes pensées. Sa manière de présenter cette question m’a surprise parce que sa question m’a aussi semblé être un commentaire sur la différence entre générations. Voici ce que cette jeune personne m’a dit (à peu près, je ne me souviens plus de la séquence exacte des mots):

« Je ne veux pas critiquer, mais aujourd’hui nous parlons plutôt de ‘communication’ et non plus de ‘dialogue’. Donc le mot ‘dialogue’ est démodé et en entreprise il n’est plus utilisé. Ce qui est important aujourd’hui, c’est la communication. Pourquoi avez-vous alors utilisé le mot ‘dialogue’ dans votre présentation? »

Je vous avoue que je ne m’attendais pas à ce genre de commentaire qui m’a quelque peu déstabilisée. En effet, si quelqu’un est curieux de connaître mon choix de vocabulaire, il aurait très certainement posé la question autrement, par exemple « Je suis curieux de savoir pour quelle raison vous avez utilisé le mot ‘dialogue’ plutôt que le mot ‘communication’ qui est aujourd’hui très à la mode ». Tout en disant ne pas vouloir critiquer, mon interlocutrice a tout de même exprimé une critique, ce qui pour moi est un signe de manque de savoir-vivre. Vous me direz peut-être que je suis trop sensible…. en effet, je suis très sensible aux mots et aux tons de voix, ce qui est une grande ressource autant sur le plan professionnel que personnel. Il me semble évident que le mot ‘communication’ est devenu très courant, et il est bien difficile d’ignorer ce qu’est la communication aujourd’hui, même pour la personne lambda. Mes cheveux gris ne sont donc pas une preuve d’une quelconque ignorance des trends dans notre société. Je vous rassure, ils sont plutôt un signe d’une bonne expérience acquise pendant de nombreuses années sur le terrain en travaillant avec l’humain.

La signification de ces deux mots est très différente dans mon esprit. Ils ne sont pas des synonymes, ni des mots à utiliser ou à éviter parce qu’à la mode ou pas. Pour moi, le dialogue est un échange entre deux personnes, souvent profond d’ailleurs. Le dialogue, c’est deux parties qui s’entendent et qui se répondent, en comparaison au monologue où il n’y a qu’une personne qui parle, ce qui est souvent le cas dans une structure hiérarchisée, paternaliste ou élitiste. En plus, il me semble que le dialogue comporte du respect mutuel, de l’écoute et l’accès à des solutions acceptables pour toutes les parties. J’ai d’ailleurs trouvé une ébauche d’article sur Wikipédia qui reflète justement cela:

« Comme toutes communications, le dialogue comprend au minimum un émetteur et un récepteur. Cependant, le dialogue se distingue dans le processus qui unit ces deux protagonistes. Alors que la donnée émise est le message, le but du message est l’objectif de la communication ; dans un dialogue véritable, le but n’est donc pas le sujet de l’énoncé, il ne s’agit pas d’avoir raison du récepteur ni de lui imposer un point de vue cognitif, une perspective ou référence. Ainsi, par un code constituant un langage qui peut être verbal ou non verbal, une parole est contenue dans le message et transmise dans la communication, afin d’être décodée et reçue par le destinataire, puis de lui signifier quelque chose qui a du sens dans sa propre existence. Le dialogue appelle donc à ce que les acteurs de la communication soient transformés dans leur être, en toute liberté ; l’écoute active, l’humilité sincère et le respect mutuel y sont donc nécessaires. » (Wikipédia)

La communication me semble être un concept beaucoup plus vaste et même légèrement superficiel. La communication en entreprise, par exemple, peut prendre des formes diverses, notamment la communication allant de la direction aux collaborateurs (donc verticale), la communication interne entre cadres, collaborateurs, groupes ou équipes (donc horizontale), la communication entre l’entreprise et les autorités (communales, cantonales ou fédérales), la communication entre l’entreprise et les client.e.s et la communication entre l’entreprise et ses partenaires commerciaux. La communication peut aller dans un sens uniquement, ou elle peut être structurée pour aller dans plusieurs sens. Pour moi, la communication n’est rien de nouveau, elle a toujours existé en entreprise et ailleurs, en prenant des formes différentes selon la structure et la culture de l’entreprise, par exemple. Que nous mettions beaucoup d’importance sur la communication aujourd’hui, cela est autre chose. Et tant mieux, d’ailleurs, si cela peut faciliter le travail pour tout le monde et rendre le monde du travail meilleur.

Dans le coaching, il ne s’agit pas de ce genre de communication mais plutôt de dialogue. En tant que coach, entre mes coaché.e.s et moi, il y a bel et bien un dialogue, ce qui est bien entendu de la communication, mais pas forcément correspondant au concept de communication tel que nous le comprenons aujourd’hui. Dans le dialogue, les messages respectifs passent souvent par la parole mais aussi par les autres dimensions, notamment par le physique et les émotions. La communication en entreprise n’implique que très rarement ces dimensions-là. La preuve, c’est que les collaborateur.trice.s sont encouragé.e.s à ne pas s’impliquer émotionnellement dans le travail – il n’y a en effet pas de place pour les états d’âme des collaborateur.trice.s en entreprise, ou du moins c’est cela qui me semble être le cas dans beaucoup d’entreprises.

Par conséquent, le coaching n’est pas que de la communication, et là, j’ai l’impression de me répéter! Le coaching est un accompagnement vers le changement dans la vie d’une personne, donc un dialogue profond qui va faire avancer la personne coachée vers une nouvelle compréhension d’elle-même et de son entourage, de ses actions et des systèmes dans lesquels elle évolue. Le dialogue existe entre moi en tant que coach et la personne que je coache, mais aussi (et surtout) le dialogue que la personne coachée mène avec elle-même. A moins que je ne me trompe, la communication en entreprise n’a pas la prétention d’atteindre ce genre de but. Donc pour moi, le mot ‘dialogue’ est le mot juste pour ce qui se passe entre moi, la coach, et la personne coachée lors d’un coaching.

C’est pour cela que je continuerai à utiliser le mot ‘dialogue’ plutôt que ‘communication’ lorsque je parle de coaching. Et si mon choix de vocabulaire perturbe mon interlocuteur parce que c’est un mot qui lui paraît démodé, c’est la preuve qu’il n’a pas compris ce que j’ai expliqué par rapport au coaching. De mon côté, je peux inclure la distinction que je fais entre les mots ‘dialogue’ et ‘communication’ lors de ma prochaine présentation du coaching. Je me réjouis déjà de pouvoir enrichir ma présentation dans ce sens-là!

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